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Face A
27 décembre 2005

« Il ne faut jamais revenir... »

Hier soir, alors que je tentais de trouver le sommeil, je ne sais quel cheminement de pensées m'a ramené dans le « village » dans lequel j'ai passé mon enfance et grandi jusqu'à l'âge de vingt ans.
Je ne sais trop comment définir ce lieu ; une sorte de cité résidentielle qui a poussé au milieu de rien vers le début des années 60, à proximité de la ville, constituée de pavillons tous identiques, revêtus de crépi beige et couverts de tuiles rouges et dont la disposition se répète de lotissement en lotissement, ce qui entraînait souvent des coups de téléphone dépités des gens qui tentaient de nous y rendre visite, persuadés d'être arrivés à bon port et qui ne trouvaient pourtant pas notre maison.
Et dans un demi-sommeil, je parcourais hier soir les rues de ces lotissements sans âme, me remémorant au fur et à mesure que j'y avançais les itinéraires que je suivais pour aller à l'école ou chez mes camarades de classe. Arrivé au bout d'une rue, je m'arrêtais alors sans savoir où elle débouchait, soit parce que je l'avais oublié, soit parce qu'enfant, je ne m'étais pas aventuré plus loin. Mon souvenir retrouvait aussi des endroits oubliés qui ressurgissaient soudain dans l'obscurité de la chambre : le château d'eau où j'aimais me rendre à vélo pour dévaler les pentes des chemins voisins qui quittaient les habitations pour plonger dans les champs, vers ces grandes serres qui me faisaient peur. La place du Mail entourée de ces grands arbres dans lesquels nous grimpions, la pente qui partait devant l'école, et que j'aimais aussi dévaler à vélo.
Dans mon parcours mental, tous ces endroits me sont apparus déserts. Avant que je ne quitte la maison, les quatre dernières années, je m'étais mis à détester cette ville sans âme qui s'étendait à vue d'œil, poussant comme un champignon. J'y ai grandi heureux pourtant, mais ces quartiers répétés à l'identique, ces grandes places vides que jamais personne ne traversait, tout cela manquait cruellement de vie, d'histoire, de passé. Je sais que certains, de mon âge, y sont restés. Certains ont même repris la maison de leurs parents pour y élever à leur tour des enfants. Cette pensée me fait froid dans le dos. La simple idée de retourner sur ces lieux me glace le sang. Je sais bien qu'un jour, discrètement, je prendrai la voiture et tenterai de retrouver la maison où j'ai grandi, je parcourrai à pied ces rues tristes et silencieuses. Mais ce sera pour mieux prendre conscience du chemin parcouru, et pour me féliciter d'en être parti.

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Commentaires
M
Oui tu y reviendras et de plus en plus souvent. Parce que c'est dans ta chair, dans tes neurones, c'est une empreinte dans ton "âme" et finalement, c'est dans tes gènes. Même si c'est moche ou glauque, c'est une partie de toi. Et tu ne pourras rien y faire. Ceci étant, voilà une superbe note que tu dois à cet endroit pourri. A+
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