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Face A
25 août 2007

Es hätte eine schöne Geschichte sein können…Et ça

Es hätte eine schöne Geschichte sein können…
Et ça avait commencé comme ça.

Réveil tardif mardi matin, à l'heure où nous aurions dû quitter la maison. Départ précipité pour l'aéroport, pas réveillés. À côté de moi, dans l'avion, un éphèbe tout droit sorti des studios Bel-Ami dort, et j'observe à la dérobée son cou qui palpite, ses lèvres parfaites qui se découpent à contre-jour contre le ciel bleu à travers le hublot.
Hambourg est sous la pluie et le vent. Dans le taxi qui me conduit en ville, les oreilles encore bouchées et douloureuses, je sens l'excitation me gagner alors que nous pénétrons plus avant dans le centre. L'hôtel est idéalement situé, sur l'Esplanade, à deux pas de l'Alster et des Colonnades. Le pélerinage commence l'après-midi même, et j'arpente la cité à la recherche des lieux qui m'ont vu il y a dix ans vivre cette époque cruciale de ma vie.
La matinée du lendemain me voit poursuivre cette quête du passé. Je pars vers Sternschanze, mon ancien quartier de prédilection, cette faille de l'été 1996. Tout, j'ai tout retrouvé. Et c'étaient les mêmes odeurs. À mon grand étonnement, la Rote Flora est encore debout. Ce parfum dans l'air, autour de la station de métro, le numéro 13 de la Rosenhofstraße, seul le nom sur la sonnette n'est plus là. Je me revois.
Je pousse toujours plus haut et trouve tous les appartements que j'ai habités alors (j'avais déménagé cinq fois en un peu plus d'un an à peine), et toujours, je retrouve tout.

Le rendez-vous des retrouvailles est pour 15 heures. Devant la cité U où nous avions passé cet été de 1997, celui que nous considérions comme le plus beau de notre vie, sans aucun doute. Il l'est encore pour moi. Il pleut mais je m'en fiche, la joie est là, l'excitation, le plaisir de l'attente. Je me poste devant le bâtiment, personne n'est encore arrivé. Une vieille dame tombe sur le trottoir et se retrouve le visage ensanglanté, deux jeunes gens appellent les pompiers et la dame finit par repartir en taxi. J'envoie un SMS à mon homme, qui me rappelle. Une averse, une trève, une autre averse. Je parcours la rue en long et en large, et recouvre peu à peu une certaine lucidité. Ils ne viendront pas. Personne ne sera là. Je suis le seul couillon pour qui c'était vraiment important. Je suis le seul naïf qui s'en est souvenu, de ce rendez-vous dans dix ans. Je ressors de ma poche ce morceau du puzzle que nous avions confectionné, vérifie la date et l'heure. « Le puzzle doit être complet », est-il écrit. Cette phrase m'arrache un sourire désabusé qui se transforme rapidement en grimace.
Une heure et demi plus tard, je me résigne à repartir. Au fur et à mesure que je longe cette rue interminable pour regagner la station de métro, me retournant sans cesse dans l'espoir d'apercevoir une silhouette surgir à l'angle du bâtiment, me gagne un sentiment déchirant. J'ai soudain la certitude que je ne reverrai jamais cet endroit, que je ne reviendrai jamais dans cette ville, et c'est comme un morceau de moi-même que l'on m'arrache et que je laisse ici.

Quand j'avais quitté Hambourg il y a dix ans, je savais que j'y reviendrais, et même si nous avions tous le cœur lourd, nous avions la perspective de ces retrouvailles, et d'autres rencontres dont certaines ont d'ailleurs eu lieu. Mais là, ce mercredi pluvieux d'août 2007, en quittant cette rue avec regret et amertume, je laissais derrière moi tout un pan de mon histoire, je fermais définitivement la page d'un livre que j'avais été le seul à continuer de lire pendant ces dix années. Je n'en veux à personne, que ce soit clair. Je comprends bien que la distance, la mémoire, l'occupation, les priorités, la vie, sont des raisons amplement suffisantes pour ne pas être venus. Si j'en veux à quelqu'un, c'est bien à moi. D'avoir été aussi naïf. Et d'un autre côté, j'ai tout de même ma fierté. Je l'ai fait, moi. Je m'en suis souvenu, et j'y suis allé. Je suis allé jusqu'au bout de mes promesses et j'ai procédé tout seul à ma cérémonie d'enterrement du passé. Une larme a coulé sur ma joue lorsque je me suis assis dans le métro qui a redémarré sous la pluie. J'ai ressenti cette sensation étrange d'un morceau de mon cœur qui restait coincé là-bas, derrière moi qui repartais à regret.

J'ai donc dû passer autrement que prévu le temps qu'il me restait à passer à Hambourg, et la fin de mon séjour a été imprégnée d'une mélancolie poisseuse que j'ai trainée sous le soleil du jeudi dans le port et la vieille ville. J'ai salué les fantômes de la Speicherstadt tout en continuant de retrouver les miens pour leur faire un dernier adieu, et j'ai repris l'avion sous un soleil radieux pour m'arracher à cette ville que j'ai tant aimée.

En espérant secrètement y revenir un jour.

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Commentaires
F
Maaa, ils ne sont pas nuls, je peux leur trouver toutes les excuses possibles et je ne leur en veux pas.<br /> Comme le dit kitty, tant pis pour eux, c'est tout. Ils ont loupé le "farf 10 ans après" qui les aurait éblouis ;)
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K
Rester naïf expose à bien des déceptions, c'est sûr. Pourtant il faut impérativement le rester. <br /> Sois fier, tu sais encore accorder de la valeur à des promesses anciennes alors que les autres, eux, sont devenus si prisonniers de leur vie quotidienne qu'ils ont laissé passer l'occasion de la précieuse parenthèse qu'auraient été ces retrouvailles.<br /> Tant pis pour eux!
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M
je ne comprends pas les gens. <br /> j'en aurais rêvé d'un rendez-vous dans dix ans.<br /> et ceux qui se le sont promis ne le tiennent pas. <br /> triste.<br /> enfin toi tu y es allé<br /> ce sont les autres, les nuls.
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