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Face A
2 février 2005

-1-

Le voilà, le récit. Parce que j'en ai envie, c'est tout. Il sera incomplet, il sera vrai ou faux, il sera court ou très long, il ne s'achèvera pas puisqu'il est en cours de vie. C'est juste un exercice, un si je devais dire.
Il manquera beaucoup d'éléments. Il ne verra peut-être pas le jour. Il verra la nuit alors.
Justement, la nuit, c'est là que tout commence. Dans l'obscurité hachée de lumières d'une boîte de nuit. A moins que tout ait commencé bien avant déjà, ou bien après.
Je resterai sur cette nuit.

Je ne voulais pourtant pas sortir, je me l'étais promis. Les semaines précédentes avaient été très agitées, alcool permanent, des nuits entières dans le flou et les journées de vertiges. Toulouse hibernait dans le gris de l'hiver, peut-être essayions-nous de contrer ce sommeil par l'excès. Je ne garde de cette période de ma vie que des bribes de souvenirs. Ce soir-là étrangement reste présent.
Vincent et Stéphanie venaient de passer quelques jours à la maison. Journées de balades et soirées arrosées, nous étions très fatigués. Une fois la porte refermée derrière eux, je m'apprêtai à passer une soirée enfin tranquille. Le ménage s'imposait et l'envie manquait de toute façon. Trop, trop. Je ne sais plus qui m'avait appelé. Certainement était-ce Mick, à moins que ce ne fût Pierre, pour me proposer comme tous les dimanches soir d'aller prendre un verre au Cactus pour l'apéro. Je refusai sans conviction et finis par accepter. « D'accord, mais juste un verre et je rentre. »

Je parcourus donc en maugréant les quelques centaines de mètres qui me séparaient de ce bar, où avait lieu chaque dimanche un concert gratuit donné à l'heure de l'apéro. Nous avions l'habitude de nous y retrouver, toujours les mêmes ou presque, pour finir la semaine de façon agréable.
A vrai dire, le terme de semaine n'avait pas vraiment de sens pour moi, à cette époque. Je venais de terminer mes deux ans d'objection et avais décidé de plaquer mon DEA pour tenter les concours d'entrée de diverses écoles de traduction. Je m'étais donc inscrit aux ASSEDIC et étais censé préparer assidûment mes concours, bénéficiant du RMI et des allocations logement. En réalité, je passais mon temps à aller au cinéma ou à faire la fête, et à dormir. Que l'on soit dimanche ou lundi m'indifférait donc au plus haut point.
Je ne sais plus comment j'en étais arrivé à discuter avec ces deux filles que je ne connaissais pas. Le concert devait être inintéressant comme souvent, et l'alcool m'avait revigoré. Une fois la foule dispersée, je me retrouvai à leur table et leur proposai d'aller danser. Fait rare chez moi, j'en avais très envie ce soir-là. Les deux filles, enthousiastes, se mirent à réfléchir à l'endroit où nous pourrions aller. Nous n'avions pas trop le choix, la seule boîte ouverte en ville le dimanche étant le Shanghai.

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